Mélomane avant tout, batteuse et développeuse web pour artistes, Jessica Kuijer baigne dans le milieu musical depuis son plus jeune age. Passionnée de musique pop rock folk indie et de concerts, elle aime surtout partager et faire découvrir de nouveaux talents comme ceux déjà existants.
St.Vincent. est Annie Clarke. Mais qui est-elle? Quel est cet étrange être souhaitant exprimer toute sa force et toute sa fragilité dans un même album? ou bien plusieurs?
J’ai tenté de répondre à ces quelques questions que je me pose depuis l’écoute du morceau “New York” en me rendant au concert du mardi 24/10 au Trianon.
A mes yeux et je le pense depuis une bonne dizaine d’années, Annie Clarke est une de ces artistes qui est née artiste. J’entends par là qu’elle a certainement pensé depuis très jeune, à ce que sera son art demain et comment l’exprimer aussi de façon très visuelle. Je la pense très engagée sur des tas de sujets de fond, soutenant de façon générale la place des femmes dans le monde. Pour moi, elle dénonce l’abus de pouvoir au travers de sa voix, de ses textes et des ses instruments.
Sans entrer dans des débats actuels dénonçant le principe de consentement de la femme, pour moi, l’album “Masseduction” est une des ces réponses bien trempées au regard d’une société qui lance ses diktats. Cet album affiche au fond toutes les peurs et toutes les angoisses que chacun éprouve ou traverse au cours de sa vie (un peu comme dans un épisode de l’excellente série “This is us”…oui je dévie du sujet et je l’assume complètement 🙂) à l’écoute de “Pills” sur les addictions ou de “Los Ageless” frustré d’amour; un album sans aucune fioriture et avec une prise de risque de se perdre dans les abîmes de l’absurdité.
St.Vincent s’affiche telle qu’elle est aujourd’hui, telle une parfaite David Bowie des temps modernes.
J’ai découvert Annie Clarke il y a presque 10ans sur une reprise de Jackson Browne, un des meilleurs paroliers du style folk americain bluegrass. Elle reprenait “These Days” qu’une autre de mes chanteuses préférés (du monde entier), Gemma Hayes, reprendra quelques temps plus tard pour les potentielles mêmes raisons…celle de l’authenticité et surtout cette phrase finale qui résume exactement ce qu’est peut-être Annie Clarke.
“Don’t confront me with my failures
I had not forgotten them”
Traduction: “Ne me confrontez pas avec mes échecs, je ne les avais pas oubliés”.
Dix ans plus tard et une ou deux oreilles que j’ai laissé glisser sur ses albums “Love this Giant” et “St.Vincent”, elle revient avec l’érotique album “Masseduction” et ses distorsions de guitare encore réinventées.
L’album est sorti le 13/10 sur toutes les plateformes de streaming et bons disquaires 🙂
Le bal s’ouvre sur un film. The Birthday Party fait partie de l’anthologie “XX” de courts-métrages d’horreur réalisés par un collectif de femmes dont Annie Clarke a participé.
Visuellement et musicalement angoissant, le film donne le ton de la soirée. Atypique!
A l’approche d’Halloween c’était plutôt pas mal. Sans trop dévoiler le court-métrage, il m’a vaguement fait pensé à son titre “Cheerleader” pour les mêmes émotions et fissures…
Deuxième acte, une succession d’anciens morceaux dont l’excellent “Birth in reverse“, “Cruel“, “Rattlesnake“, “Cheerleader”, “Actor out of work“, “Digital Witness” et pour moi un des plus beaux moments du concert ou elle était allongée en position fœtale pendant tout le morceau “Strange Mercy“…
(Crédits photos: Sarah Desti)
Troisième acte, déploiement du nouvel album et tiré de rideau sur le magnifique “Slow Disco” puis “Smoking Section” où j’imaginais le temps de cette chanson que le monde s’arrêtait de tourner un peu.
A mes yeux et pour tout le reste de mon corps, ce concert était parfaitement édulcoré et techniquement carré à souhait. Au niveau de la vague émotionnelle qui m’a submergée, St.Vincent me suscite autant de fantasmes que de questions qui resteront en suspens jusqu’au prochain spectacle.
J’ai encore envie d’écouter l’album et de fermer les yeux sur les paroles It’s not the end qui laissent présager une belle suite…